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Baronne Samedi

Broutilles paraissant le crésudi

Versailles - Opéra L'Uomo femina - Gallupi/Dumestre/Jaoui

Publié le 15 Décembre 2024 par Baronne Samedi in Opéra, Versailles

Le bouleversement de l’autorité et des genres sont le sujet principal de cette œuvre burlesque du vénitien Baldassare Galuppi en 1762.

Sous la direction de Vincent Dumestre, le Poème Harmonique, spécialiste de la musique baroque, fait vivre la partition de Galuppi avec brio et légèreté.

Agnès Jaoui, qui avait précédemment mis en scène Tosca de Puccini, nous a offert un bijou de comédie, dans un décor très réussi. 

Photo (c) Mirco Magliocca

Photo (c) Mirco Magliocca

Deux naufragés, Roberto et son valet Giannino, échouent  sur une plage où ils sont découverts par Ramira et Cassandra, confidentes de la reine Cretidea qui règne sur l'île où les femmes dominent les hommes considérés comme des êtres faibles et coquets, uniquement destinés à plaire et à être protégés.

Cretidea, intéressée par l'allure rude de Roberto le réclame pour elle puisque, selon la loi, tout ce que la mer dépose sur le rivage appartient au trésor royal.  Cassandra refuse car elle considère que l'homme lui appartient puisqu'elle l'a sauvé.

François Rougier en  Giannino et Victor Sicard en Roberto - Photo (c) Mirco Magliocca

François Rougier en Giannino et Victor Sicard en Roberto - Photo (c) Mirco Magliocca

Gelsomino, le joli favori de la reine, est plongé dans le désespoir et l'horreur de voir ces hommes dégénérés, sans finesse ni élégance.

Dans ce rôle, Anas Séguin parvient à concilier avec beaucoup d'humour son baryton et ses tenues flamboyantes.

Anas Séguin en Gelsomino - Photo (c) Mirco Magliocca

Anas Séguin en Gelsomino - Photo (c) Mirco Magliocca

Porté par la musique magnifique de Galuppi, le débat fait rage. Qui doit gouverner ?  Qui a inventé le sexe faible ? Enfanter serait-il une raison de perdre toute autonomie ?

Le drame est une hilarante charge satirique des moeurs patriarcales de l'époque. Le librettiste Pietro Chiari était un écrivain engagé avec une vision avant-gardiste.

Il écrivit notamment que son siècle éclairé serait "suivi d'autres siècles dans lesquels les droits des femmes seront reconnus, la nature n'ayant pas prédestiné les femmes à être les esclaves des hommes mais leurs égales et leurs compagnes".

Photo (c) Mirco Magliocca

Photo (c) Mirco Magliocca

Si Giannino s'accommode de son nouveau statut d'être soumis et choyé, Roberto le refuse et se réclamant de la "loi naturelle" dans son pays natal, il réclame pour les hommes un statut dominant.

Il parvient à convaincre Cassandra, énamourée, de rejoindre son point de vue mais cette rébellion les expose à la colère vengeresse de la reine.

Versailles - Opéra L'Uomo femina - Gallupi/Dumestre/Jaoui

Avec non seulement des voix magnifiques, les artistes avaient aussi de solides talents de comédie, habitant complètement leurs personnages. 

Cretidea/Eva Zaïcik était vraiment royale, bien entourée de Ramira/Lucile Richardot et Cassandra/Victoire Bunel interprétant des femmes de caractère sans rien perdre en musicalité.  

Baryton, parangon de virilité, le rebelle Roberto/Victor Sicard, a su ajouter les touches d'humour le rendant attachant.

Le ténor François Rougier, en Gianinno, avait peu de texte mais il a fait sensation en minaudant avec son costume et ses accessoires jusqu'à un morceau de bravoure en voix de tête particulièrement bien timbré.

Grâce aux costumes et une gestuelle complexe, les rôles muets des figurants ont donné vie à cette cour d'hommes pomponnés dédiés à la toilette et la quenouille.

Victor Sicard en Roberto et Eva Zaïcik en Cretidea   Photo (c) Mirco Magliocca

Victor Sicard en Roberto et Eva Zaïcik en Cretidea Photo (c) Mirco Magliocca

Les dialogues sont piquants et un coup de théâtre à deux sous est ridiculisé par l'auteur même, en quelques mots d'auto-dérision.

Si la fin est convenue, comme l'exigeait l'époque, elle perd toute justification grâce au choeur final  à qui le librettiste fait dire  : "Qui a du bon sens et un bon flair peut comprendre sans hésiter ce que l'auteur n'a pas écrit par hasard".

Dans la mise en scène, si l'on voit Roberto sur le trône, il tient une quenouille et Cretidea, même en l'appelant son époux, a gardé son sceptre...

J'ai applaudi de bon coeur cette excellente représentation et j'avais encore le sourire en arrivant à l'hôtel.

__ * __

L'Uomo femina - Dramma giocoso en trois actes sur  une musique de Baldassare Galuppi et un livret de Pietro Chiari, créé à Venise en 1762.

Mise en scène Agnès Jaoui
Costumes Pierre-Jean Larroque Coiffure et maquillage Julie Poulain
Décors Alban Ho Van Lumières Dominique Bruguière  

Orchestre Le Poème Harmonique sous la direction de  Vincent Dumestre

Avec
Cretidea, 
mezzo-soprano Eva Zaïcik Ramira, mezzo-soprano Lucile Richardot Cassandra, mezzo-soprano Victoire Bunel
Gelsomino, baryton Anas Seguin Roberto, baryton Victor Sicard Giannino, ténor François Rougier
Figurants David Badau, Grégoire Blanchon, Mylène Duhoux, Adrien Lamberti, Aude Heylay Ulrich, Bettina von Schramm

Production déléguée : Opéra de Dijon - Coproduction : Opéra Royal Château de Versailles Spectacles, Le Poème Harmonique, Théâtre de Caen.

© Château de Versailles / Thomas Garnier.
© Château de Versailles / Thomas Garnier.
© Château de Versailles / Thomas Garnier.
© Château de Versailles / Thomas Garnier.
© Château de Versailles / Thomas Garnier.
© Château de Versailles / Thomas Garnier.

© Château de Versailles / Thomas Garnier.

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