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Baronne Samedi

Broutilles paraissant le crésudi

Cosi fan tutte - Mozart/Ward/Signeyrole

Publié le 22 Juin 2025 par Baronne Samedi in Musique, Opéra, Opéra de Lyon, Lyon

Grâce au succès des Noces de Figaro, Joseph II commanda à Mozart un opéra-bouffe, avec Lorenzo da Ponte, pour le livret. 

Le thème imposé par l'empereur était inspiré d'un événement qui avait amusé tout Vienne : deux officiers à Trieste avaient échangé leurs femmes. Livret et partition furent écrits en un mois, et la première représentation donnée en janvier 1790, avec succès. 

L'intrigue, apparemment simple, suscite néanmoins une réflexion sur la versatilité des sentiments amoureux. 

Le vieux philosophie Don Alfonso, veut prouver à ses étudiants que n'importe qui peut être infidèle un jour.  Guglielmo et Ferrando se montrent très incrédules, aussi Don Alfonso leur propose de parier sur la fidélité de leurs fiancées respectives, Fiordiligi et Dorabella.   

Prétextant avoir été appelés sous les drapeaux, Guglielmo et Ferrando font leurs adieux à leurs fiancées éplorées puis reviennent déguisés en étrangers pour tenter de séduire, chacun, la fiancée de l'autre. C'est ainsi que commence une machination tragi-comique dont la conclusion pourrait s'avérer dangereuse...  

(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

Sous la baguette de Duncan Ward, placé à la tête de l’Orchestre de l’Opéra national de Lyon, la longue ouverture guillerette annonce d'emblée la farce qui va suivre.   

Sur scène, dans un atelier d'artiste, de jeunes gens batifolent avant de s'enfuir et laisser place à des gradins. En effet, selon le sous-titre de l'opéra "L'école des amants", la metteuse en scène Marie-Ève Signeyrole, a placé le récit dans une école de beaux-arts. 

Ce qui, dans le livret, était un pari devient une expérience sociologique menée par Don Alfonso, un professeur qui veut prouver que les sentiments amoureux sont fragiles. A cette fin, un monologue explicatif a été rajouté et à mesure du  récit, des vidéos et tableaux pédagogiques soulignent les étapes. 

(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

Les gradins accueillent les étudiants face au public puis, à mesure de l'histoire,  se séparent et pivotent pour créer un espace de décor et de jeu. 

Ainsi, les figurants, en costumes contemporains, sont à la fois acteurs et témoins de l'expérience, et ils sont nombreux car la metteuse en scène a recruté 20 couples de jeunes volontaires, différents à chaque représentation.

Les chœurs de l’opéra, toujours bien préparés par Benedict Kearns, réussissent néanmoins à se mêler avec aisance avec la foule des étudiants. 

(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

Animant encore plus le décor, la metteuse en scène utilise largement la vidéo, que ce soient des enregistrements préalables ou des images saisies en direct, diffusant de gros plans sur divers écrans... un véritable kaléidoscope ! On a même eu un fond de scène où défile la route tandis que les soldats partent à vélo, phares braqués sur le public. 

Le fait est que c'est trop à mon goût. On a peine à distinguer les solistes dans la foule et c'est un va-et-vient permanent des interprètes et figurants, avec les poses de nu dans l'atelier, les dessinateurs qui promènent leur chevalet, les passages entre scène de vie et salle de classe marqués par des lumières aveuglantes... 

(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

On ne sait plus où donner du regard, d'autant qu'on doit suivre aussi les sur-titres de traduction.  Au bout du compte, j'ai eu le sentiment tout ce remue-ménage ne mettait pas en valeur les chanteurs et chanteuses qui sont, pour moi, le plus important. 

(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

La partition comporte de nombreux duos et ensembles, et beaucoup de récitatifs dont je ne suis jamais friande mais qui sont ici agréablement étoffés de touches de clavecin ou de violoncelle.

Bien que Don Alfonso soit un rôle pour basse, c'est le baryton au timbre chaleureux  de Simone del Savio qui lui donne sa voix, jouant tous les registres du professeur manipulant les jeunes gens comme des marionnettes. 

Issu du Studio de l’Opéra de Lyon et ténor prometteur, Robert Lewis est un Ferrando émouvant, dans un rôle exigeant, avec juste un peu de raideur dans les transitions.  

Ilya Kutyukhin donne à Guglielmo un riche baryton, doublé d’un belle prestance de comédien.

(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

Dorabella, incarnée par Deepa Johnny, est rendue par un mezzo-soprano emphatique mais nuancé au gré des situations.

J'ai été particulièrement séduite par Tamara Banješević, en Fiordiligi, dont le soprano puissant dans les aigus et clair dans les graves, a de beaux tenuti.

Despina, complice de la manipulation de Don Alfonso, était portée par la jeune Giulia Scopelliti, issue du Studio de l’Opéra de Lyon. Son beau soprano s'accompagnait d'un jeu de scène plein d'allant, aussi à l’aise dans sa voix de servante que dans celle, travestie, de médecin ou de notaire.  Lors du passage de la "pierre de Messmer", elle a endossé à merveille le costume d'infirmière borgne, un clin d'oeil de Fabien Teigné à Tarantino

Cosi fan tutte - Mozart/Ward/Signeyrole
(c) Paul Bourdrel

(c) Paul Bourdrel

Cosi fan tutte - Opéra bouffe en 2 actes, 1790 - Nouvelle production
Musique Wolfgang Amadeus Mozart - Livret Lorenzo Da Ponte
En italien surtitré en français - Durée
 3h35, entracte inclus

Direction musicale  Duncan Ward - Chef des Chœurs Benedict Kearns
Mise en scène et vidéo  Marie-Eve Signeyrole
Dramaturgie Louis Geisler
Décors et costumes Fabien Teigné - Lumières Philippe Berthomé

Orchestre et Chœurs de l’Opéra de Lyon

Avec :
Fiordiligi, soprano, dame en visite à Naples  Tamara Banješević
Dorabella, soprano, sœur de Fiordiligi           Deepa Johnny
Ferrando, ténor, amant de Dorabella             Robert Lewis*
Guglielmo, baryton, amant de Fiordiligi         Ilya Kutyukhin
Don Alfonso, basse, vieux philosophe           Simone Del Savio
Despina, soprano, servante des dames          Giulia Scopelliti *

(*) Studio de l'Opéra de Lyon, promotion 2022-2024

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