C'est avec grand plaisir que je suis retournée à la Cave des Echansons de la Croix-Rousse pour de nouvelles découvertes. Cette fois-ci, Laurent s'est adjoint un complice, en la personne de Stéphan des Chocolats d'Abi et Lisa.
Rassurez-vous : les combinaisons n'incluaient pas de vins rouges (j'avoue avoir frémi à cette idée).
Nous avons commencé avec une préparation dont je n'avais encore jamais entendu parler : la cartagène (cartagena, en occitan), également écrit "carthagène".
Typique du Languedoc, il s'agit d'une mistelle, c'est-à-dire un mélange de moût de raisin dont la fermentation est arrêtée par addition d'eau de vie.
Il n'y a pas d'ajout de sucre dans le moût, car cela s'apparenterait à un vin doux de type muscat.
Après ajout de l'alcool, la mistelle est ensuite vieillie en cuve ou en foudre. Jeune, elle garde le goût du raisin. Plus vieille, elle évolue vers des arômes madérisés (saveur dite "rancio")
L'alcool utilisé est neutre, titrant autour de 96 %. Plus son degré alcoolique est élevé, plus faible sera sa proportion. Ainsi, c'est le moût seul qui donne les arômes.
Nous avons goûté une délicieuse production bio du Domaine Virgile Joly. Au nez, on sent nettement l'eau de vie mais en bouche, c'est plus doux, avec une réminiscence de muscat, mais avec un arôme distinct subtil à la fois floral et fruité.
Stéphan nous a proposé des orangettes pour une mariage parfait de la douceur du cartagène, la force du chocolat noir et la résonance du fruit.
La seconde dégustation était une Clairette de Die.
J'avoue que la perspective m'a fait frémir car dans mon adolescence drômoise, la clairette était un mousseux acide principalement buvable en mélange de marquisette.
Laurent a vite écarté ce vilain souvenir en expliquant la différence entre la version industrielle, fermentée à grand renfort de sucre ajouté dans les bouteilles et la véritable recette traditionnelle.
Déjà Pline l’Ancien, au 1er siècle, évoquait ce vin doux effervescent du pays des Voconces, refroidi en dolias l’hiver pour une reprise en fermentation au printemps. Il était déjà produit à partir de muscat petits grains qui entre aujourd’hui pour un minimum de 75 % dans l’appellation, devenue AOC en 1942.
C’est en 1971 qu’à été validée la «méthode dioise ancestrale» reposant sur une fermentation incomplète en cuve à basse température qui se poursuit en bouteille à partir du seul sucre résiduel du raisin. Après quatre mois sur lie, la suppression des levures s’effectue par filtrage.
Nous avons goûté une succulente version élaborée en biodynamie par le groupement Côté Cairn.
Ses bulles délicates relèvent une saveur de pêche surprenante, et la proposition de Stéphan a été un praliné au sucre pétillant qui est venu encore tonifier le tout.
La dernière découverte était un whisky français, triple malt tourbé, de Bellevoye.
Et là, je ne peux rien en dire car si j'ai pris stoïquement une gorgée, le fait est que je partage l'opinion de Pierre Desproges sur le whisky, quelle qu'en soit la composition, l'âge ou la provenance.
Tandis que les amateurs s'en régalaient, j'en ai vite chassé le goût avec une truffe en chocolat bien que je redoutasse l'écoeurante texture de beurre sucré.
Mais, surprise ! elle était divine de légèreté. Il semble que les Chocolats d'Abi et Lisa soient en accord avec la recette originale créée en 1895 par Louis Dufour, pâtissier à Chambéry : une bouchée de crème fraîche, vanille et cacao enrobée dans du chocolat fondu puis du cacao.