Naples - Balade dans le centre historique

Le temps de prendre mes quartiers, il est déjà 14 h 30  Heureusement, le camp de base est à côté de la piazza Dante, c'est-à-dire au coeur de la ville. 

L'urgence est de manger un morceau aussi Valentina m'emmène tout droit chez Bellini, pour prendre ce que je croyais être un "morceau" de pizza, pour 1,50 €...

Que nenni !  Il s'agit bien d'une pizza entière dont la pâte est lègère comme un nuage, couverte  d'une fine couche de tomate et fromage.

Elle est présentée "a portofoglio", c'est-à-dire pliée en quatre dans un carré de papier. Je me suis régalée mais j'ai su tout de suite que je n'aurais pas besoin de dîner !

Nous l'avons dégustée sur la place Bellini, où se trouvent les vestiges de la muraille construite par les Grecs au IVe siècle av. JC, quand la ville s'appelait encore Neapolis.

Le voyage était déjà placé sous de très bons auspices mais Fortune m'a gâtée quand un pigeon m'a chié sur la tête.

Il paraît que ça porte bonheur.

Voilà.

Bref, Valentina a eu la grâce de me débarrasser du témoignage avant qu'il ne se répande et nous avons pu nous ressaisir en prenant un café en terrasse.

Ou plutôt : elle a pris un café et j'ai pris un capuccino, me révélant dans ma splendeur de touriste, puisque les indigènes n'en prennent que le matin.

M'en fiche, j'aime trop le capuccino et puis ça restera entre nous.

Nous reprenons la balade, en saluant au passage la statue de Dante.

À l'origine, la place était appelée Largo del Mercatello (« place du marché »). Au XVIIIe siècle Charles III d'Espagne voulut un Foro Carolino au centre duquel devait être installée une statue équestre du roi.  Le monument n'a pas été réalisé et le long du périmètre, Giuseppe Sanmartino réalisa vingt-six statues représentant les vertus du roi.  Au-dessus de la niche centrale restée vide fut réalisée une tour à horloge.

La statue de Dante Alighieri  est une œuvre de Tito Angelini,  de 1871. Le poète n'était pas napolitain mais dans son oeuvre "L'enfer",  il désignait le lac Averne (près de Naples) comme un accès au monde souterrain, dans la tradition des mythologies antiques.

Ayant été copieusement bénie par un pigeon, je pensais déjà tenir ma chance, mais les porte-bonheur ne manquent pas, à Naples : 

- le gobbo, est un bossu dont l'effigie est un vieillard couvert de symboles de chance (trèfle à quatre feuille, main en geste de cornes, fer à cheval, ciseaux etc. )

- frotter le nez du buste de Pulcinella (voir l'article que je lui ai dédié)

- le cornetto (j'en ferai un article complet plus tard)

et de manière plus rustique, un boulanger a sa propre suggestion dont j'avoue que je ne l'ai pas tentée :

Le centre historique est un dédale débordant de choses à voir et je m'aperçois rapidement qu'une semaine ne m'en donnera qu'un petit aperçu... 

Les deux pierres majeures qui ont construit Naples sont le tuf jaune et le piperno, une roche magmatique grise résistante à l'usure de l'eau et qui servit dès l'antiquité pour construire des acqueducs.

La brique est aussi très présente, puis au XVIIe siècle, l'arrivée du baroque ajoute une bonne couche de décorations flamboyantes en marbre et en stuc.

L'antique, le médiéval, le gothique, le baroque... tout se superpose et s'entremêle, les pierres du passé ont été incorporées dans des constructions nouvelles. 

Voici, au détour d'une ruelle, le Pulcinella que j'ai eu grand'peine à saisir tout seul, tant il est assailli de gens voulant lui frotter le nez ou prenant des poses lascives pour être photographiées...

Plus macabre, il y a tout près l'église Santa Maria delle Anime del Purgatorio ad Arco,  construite au milieu du XVIIe pour accueillir des messes à l'intention des morts fauchés par les épidémies de peste n'ayant pas eu de sépulture chrétienne et dont les âmes demeurent donc au purgatoire.

La façade en pierre volcanique se fond dans le décor de la via dei Tribunali. L'intérieur est quant à lui typique du baroque napolitain avec ses marbres polychromes.

Il y a au sous-sol des crânes qui font l'objet d'un culte mais je n'avais pas envie d'attendre la visite guidée.

Les crânes de bronze exposés devant l'église doivent aussi faire partie des porte-bonheur car ils brillent à force d'être touchés...

Sur une note plus joyeuse, je découvre qu'une des spécialités sucrées est le baba au limoncello et je compte sur Valentina pour m'indiquer la meilleure pâtisserie de la ville, sur le chemin du retour.

La Via dei Presepi, "la rue des crèches", remonte à l'époque romaine. Dans cette rue existait un temple (aujourd'hui emplacement de l'église San Gregorio Armeno) dédié à Cérès à laquelle les habitants offraient comme ex-voto des petites statues de terracotta fabriquées dans les proches boutiques.

Ce serait l'origine des santons.

Par chance, la rue bien que très fréquentée reste accessible : Valentina m'assure qu'à l'approche de Noël, c'est la bousculade.

En fait, "crèche" est un terme trop limité car vers la fin du XVIIe siècle, on commença à mélanger le sacré (Sainte Famille, l’Adoration des bergers et des mages) et le profane avec des personnages de la vie quotidienne.

Ce sont donc des maisons entières qu'on garnit de personnages de divers corps de métiers ou de célébrités.

Ces grandes maisons font un bon mètre de haut et sont accolées les  unes aux autres par les passionnés qui collectionnent les personnages.

A ma grande surprise, les constructions sont en... liège, travaillé  bien sûr à la main.

La statue dite du Nil est une œuvre de l'époque romaine, réalisée entre les IIe et IIIe siècle apr. J.-C.  Selon la tradition, elle aurait été érigée par une communauté égyptienne venant d'Alexandrie pour célébrer le fleuve Nil, considéré par eux comme une divinité de la fertilité et de la richesse. 

Au cours des siècles, elle fut plusieurs fois oubliée, retrouvée et restaurée. A ces occasions, elle subit de nombreuses modifications.

Ainsi, au XVe siècle, en l'absence de la tête qui avait disparu, on la prit pour un personnage féminin, allaitant des putti (petits enfants), symbole de la ville nourricière : de là provient l'appellation « Corpo di Napoli » - Corps de Naples -, également donné parfois à la statue et à la petite place où elle est aujourd'hui située : le largo Corpo di Napoli.

Le sculpture fut restaurée par l'artiste Bartolomeo Mori : il plaça la statue sur un piédestal gravé d'un épigraphe, y adapta la tête masculine actuelle, remplaça le bras droit, et plaça une tête de crocodile aux pieds du dieu et une tête de sphinx sous son bras gauche. La statue ayant été à nouveau endommagée, de nouvelles restaurations eurent lieu aux XVIIIe et XIXe siècles.

Dans les années 1950, furent volées les têtes des animaux et  certains des putti. La tête du Sphinx a été retrouvée en Autriche et remise en place en 2014.

Pour terminer la promenade, comme promis, Valentina m'emmène chez un grand faiseur où je m'achète le baba au limoncello qui fera office de dessert à mon non-dîner...