Elles sont quatre et entrent sur scène en roulant des mécaniques sur une musique tonitruante qui fait presque craindre un déchaînement.
Mais non, quand le silence s'installe commence un étrange ballet désordonné où chaque corps vaque à ses enchaînements, ponctuant les mouvements d'onomatopées, de phrases fugaces, de regards amusés et de sourires désarmants.
Souvent, l'ensemble dégage une impression de faune en mouvement. Tantôt, on croit voir des poules, qui se pavanent, se cherchent et se repoussent, tantôt une aigrette déploie ses ailes dans un grâce infinie.
Fugace, une féline évolue au sol dans une souplesse dangereuse puis une assemblée se forme en un conciliabule à la fois fusionnel et batailleur.
Peu à peu les syllabes s'enchaînent en babillage, en jeu de mots, et l'humour grandit, porté par des poses cocasses, derrière en l'air et mains piquées.
Les enchaînements ont parfois un air de voguing, et dans les poses réunies face au public, c'est la fin d'une battle qui vient à l'esprit.
La perfection des gestes est fascinante, et si le mode est contemporain imprégné de hip hop et saupoudré de krump, c'est dans un ralenti stupéfiant de maîtrise qu'il se déploie.
On est hypnotisé par le jeu des bras et mains ondoyants de Manon Falgoux ; la solide musculature de Nach et d'Adélaïde Desseauve sert à merveille leurs échappées toniques ; le corps de Sophie Palmer a des accents de flamenco...
Nach explique dans sa note d’intention :
« Les femmes que je réunis ont décidé de s’emparer de leur corps et de revendiquer ce qui s’y passe, ce qui y entre ou ce qui en sort. [...]
À cet endroit nous convoquons nos puissances de femmes. Celles qui se saisissent de leur corps érotique et de leur corps politique. Des femmes qui ont la nécessité d’être ensemble, pour un partage social des émotions et des récits des corps, un partage exigeant de danses salvatrices aussi multiples que ces femmes et que les rapports qu’elles entretiennent entre elles. »
Peu à peu, en un fondu-enchaîné, l'action de resserre, un récit de femmes se précise et la connivence avec le public s'entend dans les rires ou les souffles suspendus.
La respiration des danseuses devient celle de l'extase et croît jusqu'au vagissement de l'enfant qui naît.
C'est un spectacle long, lent et pourtant fascinant, de ceux dont on n'appréhende la puissance que plus tard, quand les émotions qu'il porte trouvent la place en soi.
Elles disent – Création 2022 – Durée 1h15 mn
Chorégraphie Nach
Avec Adelaide Desseauve, Manon Falgoux, Nach, Sophie Palmer
Régie générale et création sonore Vincent Hoppe Création Lumière et Scénographie Cyril Mulon Collaboration artistique Flora Détraz Préparation vocale Dalila Khatir Stylisme Flech Kann Collaboration musicale Radikal Satan, L'Ocelle Mare Administration de production et diffusion Alice Fabbri
Production Nach Van Van Dance Company
Coproduction Les Hivernales·- CDCN d'Avignon ; Maison de la Danse, Lyon Pôle Européen de Création ;L es Halles de Schaerbeek ; Le Tangram /Scène Nationale d'Evreux - Espaces Pluriels, scène conventionnée danse Pau ; Le Lieu Unique, centre de culture contemporaine de Nantes ; Lux, Scène Nationale de Valence ; Points communs, Nouvelle Scène nationale de Cergy-Pontoise/Val d'Oise ; Atelier de Paris/CDCN ; La Villette, Initiatives d Artistes.
Dans le cadre de l'Accueil Studio, dispositif du Ministère de la Culture : Centre Chorégraphique National de Rillieux-la-Pape, Direction Yuval Pick ; Centre chorégraphique national de la Rochelle ; CCN2 - Centre chorégraphique national de Grenoble ; Viadanse, Direction Fattoumi/Lamoureux, Centre chorégraphique national de Bourgogne Franche-Comté à Belfort ; Pôle-Sud, CDCN de Strasbourg.
Soutiens, accueil en résidence : Ramdam, un centre d'art ; Festival de Marseille ; LaGeste (les ballets C de la B + kabinet K) ; Maison de la Danse, Lyon, Pôle européen de création.
Avec l'aide à la création chorégraphique du Ministère de la Culture DRAC Île-de-France.
Nach Van Van Dance Company est soutenue par l'Institut Français pour ses tournées internationales.