L'Heure espagnole est un opéra en un acte pour cinq voix solistes avec orchestre, de Maurice Ravel, d'après la comédie de Franc-Nohain qui l'a adaptée en livret.
Créée en 1911 à l’Opéra-Comique, l'oeuvre est une farce plutôt scabreuse :
Le muletier Ramiro vient faire réparer une montre par Torquemada dont sa femme lui rappelle qu’il doit partir régler les horloges municipales. Le mari sort mais Ramiro reste, au grand dam de l'épouse qui penser profiter d’une heure de liberté pour recevoir son amant Gonzalve.
Commence alors un jeu de cache-cache : pour se débarrasser de Ramiro, Concepción lui fait monter dans sa chambre une grande horloge catalane. Arrive alors Gonzalve qui finit par l'ennuyer avec sa poésie et qu'elle cache dans une seconde horloge au retour de Ramiro ; puis s'impose Inigo, le banquier venu faire une cour intempestive et qui, après des péripéties, se retrouve, lui, coincé dans la première horloge revenue dans la boutique.
Au final, c'est Ramiro qui finit par profiter des charmes de la dame tandis que les piteux amants éconduits doivent acheter les horloges pour dissiper les soupçons du mari rentré au logis.
Ravel expliquait ainsi son intention : "J'ai écrit un opéra-bouffe. En dehors de Gonzalve qui chante des sérénades et des cavatines avec des mélodies délibérément exagérées, les autres rôles donneront l'impression d'être parlés. »
Effectivement, l'oeuvre à mon goût manque de chansons mais la musique est belle, aux accents de malagueñas et de habaneras, avec les sons d'horloges rendus par les instruments.
De plus, l'histoire est amusante et la mise en scène tout comme les décors en font un bon moment de théâtre.
L'orchestre est installé en fond scène, séparé de l'action par deux écrans de mousseline sur lesquels sont projetés les dessins des décors, intérieur ou extérieur, ainsi que des animations soulignant ou complétant les textes.
On les doit à Grégoire Pont, qui est connu comme illustrateur jeunesse et qui en a fait des acteurs à part entière. Accompagné par le metteur en scène britannique James Bonas, il a pu laisser son imagination s'épanouir au rythme des espagnolades humoristiques de Ravel.
En outre, deux escaliers placés côté cour et jardin mènent à la chambre, donnant de la hauteur, et permettent des beaux moments d'escamotage lors du déplacement des horloges.
Le résultat est particulièrement séduisant, de même que les costumes d'animaux stylisés des chanteurs.
Le final aux accents de habanera donne plus de latitude aux voix, l'occasion de découvrir le beau timbre de Florence Losseau qu'on espère entendre bientôt dans des rôles plus chantés.
Ravel a néanmoins réussi son pari car l'oeuvre permet aux protagonistes de montrer tout leur talent de comédiens !
L’Heure espagnole - 1907 - Durée : 1 h
Comédie musicale en un acte de Maurice Ravel - Livret de Franc-Nohain
Concept et vidéo : Grégoire Pont - Mise en scène : James Bonas
Décors et costumes : Thibault Vancraenenbroeck
Lumières : Christophe Chaupin
Direction musicale : Vincent Renaud
Solistes du Studio de l’Opéra de Lyon
Orchestre de l’Opéra de Lyon
Concepcion, femme de Torquemada : Florence Losseau
Ramiro, le muletier : Raoul SteffanieTorquemada
Torquemada, l'horloger : Étienne Duhil de Bénazé
Gonzalve, poète : Quentin Desgeorges
Don Inigo Gomez, banquier : Christian Andrea