Au Théâtre de la Renaissance d'Oullins, jusqu'au 7 octobre, puis en tournée, la Compagnie Sandrine Anglade joue
Le soir de la première, nous avons bénéficié d'un avant-propos très enlevé de Catherine Ailloud-Nicolas, maître de conférence agrégée en Lettres moderne, dramaturge et bien sûr spécialiste de Marivaux.
1720 est une année noire pour l'auteur. Son premier essai de tragédie, Annibal, se solde par un échec et surtout, il se retrouve ruiné par la faillite de Law.
Cinq ans plus tard, marqué par cette banqueroute, il écrit L'Héritier de village, une farce cruelle autour de l'argent qui reflète l'intérêt de Marivaux
Ainsi, Blaise, le paysan, hérite de façon inattendue d’une grosse somme d’argent. Au lieu d'en profiter gaiement, il décide, sur les conseils d’un banquier, de la placer en actions. Il est désormais virtuellement riche et se pique de singer les nobles, prenant Arlequin comme domestique puis précepteur, entraînant femme et enfants dans cette folie, jusqu'à renier ce que leurs moeurs ont d'honnête.
Sandrine Anglade a opté pour une mise en abyme, plantant les personnages dans un décor de coulisses, devenant des comédiens modernes qui répètent la pièce, avec deux musiciens à la guitare électrique. Le thème récurrent est Aux marches du palais, mais d'autres mesures endiablées donnent du rythme à l'ensemble.
Sandrine Anglade a laissé toute sa place au parler paysan qui empêcherait toujours Blaise, même cousu d'or, d'échapper à sa condition.
Le contraste est hilarant, avec le Chevalier magistralement porté par Tonin Palazzoto, cynique et hâbleur à souhait. Son duo avec la fille Colette est rendu d'autant plus savoureux par l'étendue des nuances que Julie Teuf apporte au rôle.
Il y a de belles trouvailles, comme ce cours de séduction délivré par Arlequin aux enfants de Blaise, pour lequel il leur fait alterner les répliques en claquant des mains comme on dirige des fauves à la chambrière.
En début et fin de représentation, un texte didactique projeté en fond de scène, donne le contexte de l'action puis souligne que la fin pathétique résulte d'une banqueroute dont les mécanismes étaient les mêmes que la crise économique de 2008...
Mise en scène Sandrine Anglade Assistante à la mise en scène Yan Tassin
Univers sonore Romain Guerret, Arnaud Pilard (Groupe Aline) Chef de chant Nikola Takov
Scénographie Frédéric Casanova Lumières Sébastien Lefèvre
Costumes Cindy Lombardi - Réalisation Costumes Brice Wilsius Stagiaire Océane Gerum
Collaboration dramaturgique Claude Chestier
Comédiens :
Madame Damis
Arlequin
Vincent Debost
Le Chevalier
Yacine Sif El Islam ou Yan Tassin (en alternance),
Julie Teuf
Romain Guerret et Arnaud Pilard
Spectacle créé à l'Espace Georges Simenon à Rosny-sous-Bois le 1er octobre 2016