Le Festival Lumière donnait à voir ce soir The last detail (La dernière corvée), un film du réalisateur Hal Ashby, récemment restauré.
L’initiateur de cette renaissance, Grover Crisp, était là en personne pour présenter le film. Responsable de la restauration des pellicules pour Columbia Pictures, TriStar Pictures et Sony Pictures Enternainment, Grover Crisp contribue depuis plus de 25 ans à la (re)découverte des classiques du cinéma américain.
Pour The last detail, il s’est attaché à préserver la lumière et l’aspect granuleux de la photographie dont le directeur Chapman a confessé lui-même qu’ils résultaient de son manque d’expérience à l’époque.
Le résultat est pourtant une réussite car si The last detail est une comédie hilarante, c’est aussi un drame amer.
Deux sergents de marine, Billy «Badass (Grande-gueule) » Buddusky et Richard "La Mule" Mulhall se voient assigner la mission d’escorter le marin Larry Meadows de la base de Norfolk à la prison de Portsmouth.
« La Mule » (Otis Young), placide, tient à se débarrasser au plus vite de cette corvée mais «Grande-gueule » (Jack Nicholson) le convainc d’en faire un bon plan : avec la somme allouée pour une semaine de mission, ils peuvent livrer le prisonnier en deux jours et avec l’argent économisé, faire le trajet de retour en s’offrant une bringue à tout casser.
Mais à leur grande stupeur, le prisonnier, s’avère être un dadais contrit d’à peine 18 ans, kleptomane malheureux dont les huit ans de prison sont un abus flagrant du commandant.
Au gré des bus et des trains, sur l’insistance de Buddusky, les vieux briscards font de la semaine un parcours initiatique pour le gamin qui ne connaît encore ni le sexe, ni l’alcool.
Nicholson fait merveille en braillard somme toute plutôt lâche, tandis que Quaid est à la fois hilarant et pathétique dans le rôle du gamin pris dans une spirale de débauche le menant implacablement en prison.
Dans les scènes truculentes de beuverie, les dialogues sont crus, très crus même, mais ils ne font pas oublier qu’au-delà de la comédie, la solitude et le désespoir pèsent sur les trois hommes.
Buddusky et Mulhall expriment, chacun à sa manière, le sentiment grandissant de frustration que suscite en eux Meadows. Le gamin a en lui tout ce qu’ils n’ont plus ; il leur renvoie au visage l’absurdité du système qu’ils servent et qui l’a condamné à huit ans de prison pour avoir voulu carotter une tirelire.
Après la camaraderie attendrie, l’amertume s’installe... mais je ne dirai rien de la fin de ce film abouti car il sortira le 13 novembre dans sa version restaurée et sera projeté à Lyon, après le Festival Lumière.
Le film rapporta un prix d'interprétation masculine à Jack Nicholson, au Festival de Cannes de 1974, mais Randy Quaid en aurait mérité tout autant pour son jeu remarquable de nuances.
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Titre original : The Last Detail - Durée : 103 minutes
Réalisation : Hal Ashby - Scénario : Robert Towne d'après le roman de Darryl Ponicsan
Pays d'origine : États-Unis - Genre : Comédie dramatique - Date de sortie : 1973