Igor Stravinsky composa L'Histoire du soldat en 1917. A cause des restrictions d'après-guerre, il la conçut sur le modèle du théâtre ambulant, en courts tableaux.
L'argument reprend un vieux conte russe : un Soldat pauvre vend au Diable son âme, symbolisée par le violon, contre un livre magique qui fera son bonheur. Malheureusement, rien ne se passe comme il l'avait rêvé...
Outre la narration, l’œuvre n'est servie que par sept musiciens. Le compositeur voulut que chaque instrument ait un rôle de soliste et soit représentatif des principales familles instrumentales : violon et contrebasse, clarinette et basson, cornet à piston et trombone, sans oublier les percussions qui représentent le Diable.
Stravinsky souhaitait que tous les interprètes se côtoient. Ainsi Alex Ollé a organisé la scène sur deux niveaux : en haut, l'orchestre est bien visible ; en bas, cohabitent la réalité du soldat dans une chambre d'hôpital et, en projection, son univers mental de souvenirs et d'espoirs.
Le metteur en scène a souvent abordé le thème diabolique au théâtre, au cinéma et à l'opéra.
Pour faire un parallèle entre l'histoire d'un soldat d'il y a cent ans et celles de soldats contemporains, il a revisité la polémique du contrat faustien en l'abordant comme une dualité par laquelle le Soldat et le Diable sont les deux facettes d'une même personne.
Le comédien Sébastien Dutrieux incarne le Soldat complet, le Diable étant dans son alter ego comateux, qui s'exprime par voix hors champ. Des figurants incarnent les allées-venues de la famille et du personnel hospitalier.
Certes, le parti pris est original mais le résultat ne m'a pas convaincue, en particulier pour le décalage entre la musique et les projections.
Mélange de marches, d'airs paysans, de tango voire de jazz, la partition presque discordante résonne comme un amusant taraf de cirque ambulant. En répons, les images de guerre contemporaine, avec scènes de torture et intrusion dans des foyers asservis, sont insupportables.
Le propos est contemporain mais la dimension fantastique et exotique du conte a disparu. D'ailleurs, sans avoir lu la note d'intention du metteur en scène, il aurait été bien difficile de comprendre l'histoire.
Le public dans l'ensemble a néanmoins semblé intéressé aussi je ne peux que vous conseiller d'aller voir la pièce pour vous faire une opinion...
Du 25 au 29 avril 2018 au Radiant-Bellevue de Caluire - En français - Environ 1 h 30
Musique Igor Stravinski, 1917 - Livret Charles-Ferdinand Ramuz
Orchestre de l'Opéra de Lyon
Mise en scène Alex Ollé/La Fura dels Baus, assistés de Sandra Pocceschi
Dramaturgie Valentina Carrasco, Ramon Simo, Àlex Ollé, Júlia Canosa
Décors et costumes Lluc Castells - Lumières Elena Gui, Urs Shönebaum
Vidéo Emmanuel Carlier - Son Josep Sanou
Narrateur/Diable/Soldat Sébastien Dutrieux