Ce voyage aura commencé sous les pires auspices pour finalement s'annoncer sous les meilleurs.
J'avais acheté le billet d'avion Paris-Yerevan dès le mois de septembre 2011 pour partir le 18 mai 2012.
D'un naturel prudent (lisez : "je ne fais pas confiance à la SNCF"), j'avais prévu d'arriver la veille pour passer la nuit à Roissy et embarquer, fraîche et rose, le lendemain matin.
J'ai donc acheté au meilleur prix (lisez : "ni modifiable ni remboursable") un billet de TGV Prem's et un nuit au Première classe de Roissy.
Pour accélérer mon passage à la douane, j'ai aussi acheté mon visa en ligne évitant ainsi une queue à l'arrivée.
Vous connaissez cette délicieuse sensation que le plan se déroule sans accroc ? Eh bien c'est exactement celle qui s'est fissurée à partir de là.
J'ai découvert en avril que je m'étais trompée de jour pour le train, réservant le 18 au lieu du 17. Agacée de mon étourderie, j'ai mis le billet en vente et j'en ai racheté un autre qui par chance, était même moins cher.
Le lendemain, Air France m'a annoncé que mon voyage était repoussé d'un jour.
J'ai donc frénétiquement annulé la vente du billet acheté par erreur qui se retrouvait être le bon et mis en vente celui que je venais d'acheter pour rien.
[Note pour plus tard : mon erreur de billet pouvait-elle relever de la préscience et suis-je dotée de pouvoir spéciaux ?]
Outre la perpective de l'argent perdu en train et nuitée annulée, j'ai découvert avec stupeur que même une ligne régulière peut vous lâcher et sans dédommagement si on vous prévient au moins 14 jours avant (et bien sûr, pour moi, ce furent 15 jours).
Par chance, la centrale de réservation hôtelière a accepté, à titre exceptionnel, de modifier la nuitée et j'ai pu vendre le billet de train inutile.
Hier, il y avait des mouvements de grève à la SNCF (si ! si !) mais mon train fut épargné et le coeur léger, je suis arrivée à Roissy à la bonne heure et n'ai eu qu'à attendre une dizaine de minutes la navette vers l'hôtel.
Au bout de 25 mn, j'arrive à l'hôtel Première classe de Roissy mais à peine ai-je tendu ma réservation qu'on m'annonce que ce n'est pas le bon hôtel, car il y en a un autre, Roissy-Paris Nord, quoique nullement mentionné sur le panneau d'information de la navette.
A 23 h, en escarpins avec une valise à roulettes, j'ai failli courir pour rattraper la navette, heureusement arrêtée pour manoeuvrer devant l'hôtel voisin.
A 23 h 15, je suis arrivée au bon hôtel pour m'entendre dire qu'ils n'avaient jamais donné leur accord pour un changement de date, que la centrale de réservation m'avait menti et que mon bon de réservation, sans être un faux, était néanmoins inutile. On m'a aussi affirmé que la centrale était injoignable la nuit.
On m'a donc vendu une chambre pour 50 euros, en plus des 29 € pré-payés, en m'offrant néanmoins le ticket pour la navette du lendemain, en compensation, et en me promettant de faire un dossier sur mon cas.
Une fois dans la chambre, passablement agacée, j'ai ouvert mon ordinateur, trouvé le numéro de la centrale et joint une opératrice qui m'a confirmé mon bon droit et appelé la réception. Elle m'a rappelée pour me dire que la réception campait sur ses positions mais que si je lui adressais la facture à mon retour de mes vacances, elle me rembourserait. Normalement.
Au matin, j'ai pris la navette (pour info, personne ne contrôle le ticket alors économisez 5 euros) et j'ai découvert qu'il fallait plus d'une heure pour faire le rodéo hôtel > terminal 2E > porte 52. C'est dans ces moments-là qu'on apprécie l'anxiété qui nous fait prévoir beaucoup de marge dans les calculs de temps de trajet.
La salle d'embarquement était une Tour de Babel, bondée d'Arméniens retournant chez eux et d'Arméniens de la diaspora ... ça jacassait en arménien teinté d'accent français, espagnol ou américain et ça parlait français avec l'accent arménien. C'est quelque chose d'inexplicable et merveilleux.
C'est là que la malédiction s'est arrêtée, ou presque... Un couple d'Arméniens de souche s'inquiétaient de ne pouvoir appeler leur fille à qui ils avaient rendu visite à Lyon pour la rassurer sur leur bonne arrivée à Paris. Je leur ai donc proposé d'appeler avec mon mobile.
A partir de là, dans l'avion, ils ont fait échanger ma place avec quelqu'un pour m'asseoir avec eux et m'ont interdit d'envisager de prendre un taxi à l'arrivée ou de changer de l'argent à un mauvais taux d'aéroport.
Ils m'ont attendu à la douane quand (retour de la malédiction) mon visa a été déclaré invalide et que l'officier a dû mener une véritable enquête jusqu'à découvrir que l'ambassade avait fait une erreur de saisie dans le numéro de mon passeport.
Après ça, ils ont désigné un des fils venus les chercher, avec toute leur famille, pour m'emmener dans un bureau de change avantageux puis à mon auberge de jeunesse.
Non seulement il m'y a déposée mais il a insisté pour m'accompagner à la réception, soit au 5e étage d'un immeuble sans ascenseur, en portant ma valise. Il m'a aussi donné les numéros de fixe et mobile de sa mère, pour le cas où j'aurais besoin d'aide, ce à quoi j'ai répondu en donnant ma carte pour quand elle reviendra à Lyon avec son mari.
A l'auberge de jeunesse, c'est une autre Tour de Babel avec des Européens, Asiatiques et Américains, pas même d'origine arménienne, dont je me demande pourquoi ils sont là sans vouloir, ce soir, leur demander...