Grâce au Théâtre de la Renaissance d'Oullins, nous avons pu assister à la création en ligne sur Youtube de Funambule, un poème théâtral interprété par un danseur, un narrateur, un musicien et une chanteuse-filmeuse
Pour créer ce spectacle, Véronique Bettencourt et Stéphane Bernard, de la compagnie Fenil Hirsute, ont adapté le texte en prose que Jean Genet avait écrit pour son grand amour, Abdallah Bentaga.
La pièce ouvre sur quelques repères biographiques, par le jeu d'une journaliste interrogeant Jean Genet.
Ensuite viennent les fragments de texte, ode à l'excellence de l'acrobate que l'auteur adresse à Abdallah, mêlant sollicitude et injonctions, avec un lyrisme empreint de passion.
"Si je lui conseille d'éviter le luxe dans sa vie privée, si je lui conseille d'être un peu crasseux, de porter des vêtement avachis, des souliers éculés, c'est pour que, le soir sur la piste le dépaysement soit plus grand,... c'est parce que la réalité du cirque tient dans cette métaphore de la poussière en poudre d'or, mais c'est surtout parce qu'il faut que celui qui doit susciter cette image admirable soit mort, ou, si l'on y tient, qu'il se traîne sur terre comme le dernier, comme le plus pitoyable des humains...Qu'il n'existe enfin que dans son apparition... J'ajoute pourtant que tu dois risquer une mort physique définitive. La dramaturgie du Cirque l'exige... Le danger a sa raison : il obligera tes muscles à réussir une parfaite exactitude...et cette exactitude sera la beauté de ta danse..."
Genet avait 46 ans quand il rencontra l'acrobate Abdallah. Résolu à en faire un grand funambule, il l'emmena dans toute l'Europe pour voir dans les cirques les meilleurs du genre. Genet paya les cours, choisit les musique et dessina les costumes d'Abdallah, en parallèle de son travail d'écrivain. Malheureusement, lors d'une tournée, Abdallah fit une chute qui mit fin à sa carrière et le couple se sépara quelques années plus tard.
Un décor minimal évoque des coulisses et sur le mur, une petite caméra mobile projette des images saisies sur scène, chavirant parfois les repères, et donnant l'impression que le danseur est près de tomber.
La parole de Genet est dite par le comédien mais aussi parfois par la comédienne, qui en chantonne aussi des parties. Sur ce dernier point et sur l'intérêt même de l'illustration musicale par guitare et orgue, je n'ai pas été convaincue : le texte poignant n'a finalement pas besoin d'artifices.
Il n'empêche que c'est un privilège d'assister à une création, surtout en plein confinement, et le Théâtre de la Renaissance nous a fait là un beau cadeau.
Si tout va bien, la création sera visible en salle en janvier...
LE FUNAMBULE / Création prévue le 19 janvier 2021 au Théâtre de La Renaissance - Oullins Lyon Métropole.
Conception, mise en scène : Véronique Bettencourt, Stéphane Bernard
Musique : Jean-Louis Delorme
Son : Éric Dupré
Lumières : Michel Paulet
Costumes : Cathy Ray
Scénographie : Guillaume Ponroy
Avec Stéphane Bernard, Véronique Bettencourt pour le jeu, (en alternance) Kaïs Chouibi, Larbi Namouchi pour la danse, Jean-Louis Delormepour la muisque musique
Production : Fenil Hirsute
Soutiens : Ville de Lyon, Région Auvergne-Rhône-Alpes, Ramdam, un centre d’Art – dispositif d’aide à l’expérimentation, Théâtre de La Renaissance – Oullins Lyon Métropole et la Spedidam.