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Baronne Samedi

Broutilles paraissant le crésudi

Ruy Blas - Victor Hugo / Yves Beaunesne - Théâtre de la Croix-Rousse

Publié le 10 Janvier 2020 par Baronne Samedi in Art et spectacles, Théâtre, Croix-Rousse

C'est de l'excellent théâtre que nous ont offert Yves Beaunesne et sa troupe avec le Ruy Blas donné au Théâtre de la Croix-Rousse.

Balzac était bien injuste en disant que "Jamais l’odieux et l’absurde n’ont dansé de sarabande plus dévergondée".  En fait,  Victor Hugo voulait innover, chahuter les styles et mêler l’histoire au contemporain. Ruy Blas fit scandale en son temps, en donnant une place au peuple sur la scène.

L'intrigue complexe, en alexandrins, rassemble comédie, mélodrame, tragédie sociale, drame romantique... C'est cette manière de mêler l'ordre et la folie qui a inspiré  Yves Beaunesne pour mettre en scène les manigances à la cour d’Espagne.

Autour des comédiens (dont certains chantent aussi), des musiciennes interprètent sur instruments à cordes des airs aux accents baroques. C'est assez rare pour le souligner : la musique complète les dialogues sans jamais les écraser.

© Guy Delahaye

© Guy Delahaye

L'action se déroule à la fin du XVIIe siècle.  La reine exile Don Salluste car il refuse d’épouser la suivante avec laquelle il a eu un enfant.

L'homme  décide alors de se venger. Ayant entendu son laquais Ruy Blas parler de l'amour impossible qu'il voue à la reine, il l'implique dans une terrible machination en l'envoyant au palais déguisé en grand d’Espagne.

Thierry Bosc incarne un Don Salluste d'une fourberie révoltante qui augure bien mal pour le destin de Ruy Blas à qui François Deblock apporte candeur et passion.

© Guy Delahaye

© Guy Delahaye

Les alexandrins sont dits avec un naturel qui sublime l'intelligence du texte et permet des détournements drôlatiques.

Ainsi quand la Reine, en plein désarroi,  en appelle à la  Vierge et à Dieu, l'interprétation de Noémie Gantier, les yeux au ciel et sur le mode irrité, en fait un grand moment cocasse, autant que quand, prise dans les émois de l'amour, elle livre son texte sur le mode frénétique.

Ruy Blas - Victor Hugo / Yves Beaunesne  - Théâtre de la Croix-Rousse

Sa suivante, Casilda, est délicieusement piquante par la grâce de Marine Sylf, en un contraste heureux avec  la duègne de Fabienne Lucchetti, empesée à souhait.

Campé par un truculent Jean-Christophe Quenon qui lui donne une faconde irrésistible, Don César n'est pas en reste : il a une présence de Falstaff, et tire habilement parti des trouvailles du décor qui, pour être minimal, n'en est pas moins efficace.

Ruy Blas - Victor Hugo / Yves Beaunesne  - Théâtre de la Croix-Rousse

A la cour, Ruy Blas déploie son intelligence et son éloquence, autant pour dénoncer et humilier une élite accapareuse des biens de l'État que pour se montrer digne d'aimer la reine d'Espagne. 

Une remarquable surprise est la façon dont sont représentés  les Conseillers de Castille quand ils se partagent les richesses de l'Espagne au détriment du peuple et de la sécurité du pays : un procédé étonnant en fait littéralement des prédateurs...

La palme du cocasse revient à Zacharie Feron qui, en valet ivre, nous a donné une performance acrobatique d'une rare drôlerie :  un spectacle à lui seul !

En résumé, ne manquez pas cette pièce,elle vaut le déplacement.

Du 8 au 18 janvier 2020 au Théâtre de la Croix-Rousse - Durée : 2 h 15

d’après Ruy Blas de Victor Hugo (1838) | mise en scène Yves Beaunesne | avec Thierry Bosc (Don Salluste de Bazan et Don Pamfilo d’Avalos), François Deblock (Ruy Blas), Zacharie Feron (Gudiel, Le Comte d’Albe, Montazgo, un alguazil), Noémie Gantier (Dona Maria de Neubourg, reine d’Espagne), Fabienne Lucchetti (La Duchesse d’Albuquerque, une duègne, Covadenga), Maximin Marchand (Le Marquis de Santa-Cruz, Le Comte de Camporeal, un alcade), Guy Pion (Don Guritan, Le Marquis de Priego), Jean-Christophe Quenon (Don César de Bazan, Don Alvar de Benavides, Le Marquis del Basto), Marine Sylf (Casilda, Don Antonio Ubilla, un page) et les musiciennes Anne-Lise Binard et Elsa Guiet | conseillère artistique Marion Bernède | dramaturgie Jean-Christophe Blondel | scénographie Damien Caille-Perret | lumières Nathalie Perrier | musique Camille Rocailleux | costumes Jean-Daniel Vuillermoz | maquillage, coiffure et masques Cécile Kretschmar | travail de masques Vincent Rouche | maître de chant Haïm Issac | assistanat à la mise en scène Pauline Buffet et Laure Roldàn | maître de chant Haïm Isaacs | régie générale et son Olivier Pot | régie lumières en alternance Vincent Loubière/Karl Ludwig Francisco | régie plateau Éric Capuano | habilleuse, coiffeuse, maquilleuse Catherine Bénard

production: La Comédie Poitou-Charentes – CDN avec le soutien de la DRAC Nouvelle-Aquitaine/Ministère de la Culture et de la Communication de la Région Nouvelle-Aquitaine et de la Ville de Poitiers | coproduction: Château de Grignan (création), Théâtre de Liège, Théâtres de la Ville de Luxembourg, Théâtre Montansier – Versailles, Théâtre d’Angoulême – SN

avec la participation artistique de l’Ensatt et du Studio-Théâtre d’Asnières
construction du décor aux Ateliers du Théâtre de Liège

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