En fil rouge de la saison 2015/2016, l’Auditorium Orchestre National de Lyon met Shakespeare à l’honneur. Le rendez-vous le plus marquant est certainement ce spectacle donné en complicité avec le Théâtre des Célestins.
La partition de Mendelssohn est jouée dans son entier, illustrant les larges extraits de la pièce joués par les comédiens de la troupe The Factory et mis en scène par son directeur Tim Caroll.
En 1826, la lecture du Songe d’une nuit d’été inspire au tout jeune Mendelssohn l’Ouverture Op. 21 dans laquelle il insuffle l’atmosphère enchantée de la pièce de Shakespeare. A dix-huit ans à peine, et en pleine période romantique, la comédie fantastique avait de quoi enflammer son imagination.
Située dans une de personnages : on trouve des nobles, deux couples aux amours contrariées ; Oberon, roi des elfes et Titania, reine des fées qui se disputent un page ; et Puck, un farfadet malicieux à l’origine de terribles quiproquos après avoir changé la tête d’un homme en celle d’un âne.
La preuve en est la trompeuse simplicité de la mise en scène de ce spectacle qui commence avec une Ouverture menée vivement par la baguette de Leonard Slatkin.
Celle-ci annonce toute l’atmosphère de la pièce en donnant les thèmes des différents sujets, sans oublier en filigrane le "hi-han" de l'âne rendu par les violons.
La surprise survient quand, après le Scherzo, un homme se lève parmi les cuivre en déclamant, suivi d'une femme qui se dresse parmi les violons pour lui répondre.
En habits noirs de concertistes, les personnages s'entrecroisent parmi les instruments figurant les arbres de la forêt, l'avant-scène étant la clairière où se dérouleront les scènes clés.
Chacun des dix comédiens interprétant en alternance un personnage mortel et un personnage féerique, c'est un simple feston de lumières lorsque nous sommes en présence d'un esprit des bois.
Toute cette poésie est brutalement interrompue par... un livreur de pizza braillard qui traverse le public, rejoint sur scène par des ouvriers.
Ce sont les Artisans, et le contraste de la mise en abyme est absolument réjouissant. La pièce qu'ils montent tourne à la farce, avec ces allusions grivoises dont était friand le public élisabéthain et qui réussit à faire rire même le public lyonnais.
Il faut dire que chaque genre de personnage s'exprime dans un style propre : les nobles en vers blancs, les esprits en tétramètres catalectiques et les artisans en prose.
Comme le décor, les accessoires proviennent de l'orchestre : un saxophone pour figurer la fiole de sa potion tandis que Pyramus s'arme d'une cymbale et d'un archer.
Quant à Bottom, sa tête d'âne est rendue par deux pavillons de cor illustrant bien la taille de ses oreilles.
La musique de Mendelssohn est magnifique, et même si la Marche nuptiale est l'extrait le plus célèbre, tout l'acte V est un trésor d'expressivité, avec la parodie de Marche funèbre et la Danse Bergamasque.
Une fois délivré le discours d'adieu de Puck, c'est à regret que l'on entend les quatre derniers accords qui clôturent le concert comme ils l'avaient commencé.
Spectacle donné les 5 et 7 novembre 2015 à l'Auditorium de Lyon.