D'abord, une antichambre. On me fait asseoir et attendre. Longtemps.
On me fait passer dans une autre pièce. Pas de fenêtre, une table, deux chaises, un ordinateur.
Elle est arrivée, s'est assise sans même me jeter un regard et a ouvert le dossier.
- Qu'est-ce qui s'est passé avec **** en 2007 ?
- Je...
- Brièvement.
- D'accord. Les termes de l'accord étaient....
- Passons. Et là, en 2014 ?
Mon coeur s'accélère. Je rassemble des mots, des faits. Elle me dévisage, lèvres serrées, regard froid.
Les questions s'enchaînent, je ne sais plus depuis combien de temps je suis là, à justifier de mon existence.
La pièce m'étouffe et un néon clignote. J'essaie d'empêcher mes mains de se tordre. Je n'ose pas demander où sont les toilettes.
Elle se lève et désigne l'ordinateur :
- Vous avez 30 minutes pour agencer les données.
Elle sort. J'essaie de me concentrer.
Peut-être que si je fais vite, on me laissera partir.
La machine plante. Trou noir. Panique. Il faut vraiment que j'aille pisser.
J'ouvre la porte mais il n'y a qu'un long couloir où s'alignent des portes anonymes.
Je retourne à la machine et j'essaie des combinaisons. L'écran se rallume mais réclame un mot de passe. Le temps file et je veux me sortir de là.
Réfléchir, vite... La touche Entrée en espérant que ça suffise pour contourner.
Oui ! Je rattrape frénétiquement le retard.
Je ne l'ai pas entendu rentrer.
- Ces sept dernières années, vous n'avez exécuté que de petits contrats. Que s'est-il passé ?
Elle me fixe encore et mes épaules se crispent.
Et ça recommence, question après question.
Après un temps infini, elle dit "Bon." et elle sort en laissant la porte ouverte. J'attends. Longtemps. Elle ne revient pas.
Je traverse l'antichambre, personne ne m'arrête. Je m'aventure dans le couloir. Personne.
Je trouve la porte et je me rue dehors.
De l'air, enfin ! Je respire à longs traits, la sueur me glace le dos. Il fait nuit et j'ai besoin d'un café.
Ils appellent ça un entretien de recrutement.