Quand le baroque a pris d’assaut la ville de Lecce, les artisans de la ville, réputés pour leur savoir-faire, furent submergés de demandes, notamment de statues représentant des images sacrées, dans un moment de grave crise pour l'Église catholique, fortement menacée par l'hérésie luthérienne.
Les statues de la Madone, de l'Enfant Jésus et des différents saints étaient très demandées, mais en même temps il y avait une pénurie de matières premières précieuses pour créer des sujets aussi délicats et dignes d'être représentés avec tous les honneurs.
Ils avaient peu d’outils, mais beaucoup d’inspiration, aussi le papier et la colle sont devenus leur matière première et ils ont façonné de véritables chefs-d’œuvre avec ce « marbre des pauvres », déjà utilisé à Naples dès le 17e siècle.
Chiffons, colle, argile, plâtre, paille, ficelle, fer, papier étaient combinés à la créativité et à la dévotion des artisans pour produire des imitations vraiment surprenantes, difficiles à distinguer des œuvres en bois, marbre ou bronze.
De la paille et des tours de ficelle donnent du volume aux squelettes en fer filé, et l'argile forme les articulations.
Les personnages sont ensuite habillés de couches de feuilles de papier, maintenues ensemble avec de la colle à base de farine. L'alun et le sulfate de cuivre protègent les matériaux facilement périssables des moisissures et des insectes.
La ponnula, sculpture brute qui donne déjà l'idée d'une sculpture terminée, est ensuite exposée au soleil. Des cuillères chauffées au rouge, maniées avec habileté, façonnent les formes.
Viennent ensuite les travaux de plâtrerie, de stucage et de coloration à l'huile selon des procédés très anciens.
A chaque étape, les matières premières, à un coût négligeable, se mélangent et matérialisent l'œuvre d'art, fruit de la tradition et du savoir-faire des fabricants de carton-pâte, témoignage historique d'un art plein de charme.
Aujourd'hui, les héritiers de cet art se comptent sur une main, mais on trouve dans les boutiques des objets de décoration, toujours réalisés selon la tradition.
Il y a un musée dédié au carton-pâte dans le château de la ville mais à cause de travaux en cours, je n'ai pas pu y accéder.