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Baronne Samedi

Broutilles paraissant le crésudi

Toulouse-Lautrec - Kader Belarbi/Ballet de l'Opéra National du Capitole de Toulouse

Publié le 15 Mai 2023 par Baronne Samedi in Art et spectacles, Danse, Maison de la Danse, Lyon

Tradition et modernité résument la vocation du Ballet de l’Opéra national du Capitole. Fort de 35 danseurs de 14 nationalités différentes, il est un ballet ouvert sur le monde 

Pendant plus de deux siècles, le Ballet ne dansait que les divertissements des opéras présentés sur la scène du Théâtre du Capitole. Il faudra attendre 1949 pour que des soirées soient entièrement consacrées à la danse et ce n’est qu’à partir de 1994 que la troupe toulousaine deviendra une compagnie de ballet moderne avec dans son répertoire des œuvres des chorégraphes les plus prestigieux. 

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Le spectacle en tournée à Lyon est une création de Kader Belarbi célébrant la Belle époque de Toulouse-Lautrec, peintre des cabarets et des bals populaires, artiste amoureux des femmes qui se consuma dans les plaisirs des nuits parisiennes, oubliant ses jambes atrophiées. 

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Tout au long du spectacle, le contraste est poignant entre  le corps empêché du peintre et la danse débridée qu’ll célébrait dans son œuvre.

C’est d’ailleurs une gageure pour le soliste d’interpréter un homme brillant dont le corps est difforme : porté, tiré, hissé sur un tabouret, il danse aussi, malgré tout, en appui sur sa canne ou avec de curieuses torsions des jambes. 

Parfois, le peintre s'élance et virevolte comme il le faisait, sans doute, dans ses rêves.

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Dans les superbes costumes d’Olivier Bériot reflètant l’époque, les personnages se promènent dans la salle avant de retouner sur scène tandis qu’un narrateur aux allures d’apache annonce le spectacle sur le mode gouailleur de son temps.

Alternant tableaux mélancoliques et célébrations endiablées, Kader Belarbi a invité toutes les femmes qui ont marqué la vie de Toulouse-Lautrec autant que son œuvre, sans oublier sa mère, tendre et triste, qui vient souvent le visiter dans d'étranges pas de deux.

On est plongé dans cette folle époque où les messieurs se délectent d’absinthe et de femmes légères.

Cocottes ou danseuses ? Toute une troupe de femmes en dessous blancs se laissent manipuler comme des poupées avant d’endosser à vue les jupons colorés de la revue.

Par le magnifique jeu des perruques et des costumes, on reconnaît l’acrobate Cha-U-Kao et sa fameuse collerette jaune, la Goulue, Jane Avril…

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Rires et vivats éclatent dans les scènes joyeuses dont les chorégraphies sont un délice car on y voit autant la grâce de la danse classique, sur pointes, que les séquences polissonnes du cancan.

En pas de deux ou en groupe, les artistes sont remarquables, avec de superbes sauts et portés.

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Toulouse-Lautrec -  Kader Belarbi/Ballet de l'Opéra National du Capitole de Toulouse

Portant haut les gants noirs et le boa d’Yvette Guilbert, la surprise vient d'un barbu facétieux qui interprète avec drôlerie le terrible  « Quand on aime comme ça », entouré de doubles aux bras démesurés.

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Grâce à la présence sur scène de l’accordéoniste Sergio Tomassi et du pianiste Raúl Rodríguez Bey, l’ensemble est très vivant, du bal populaire au caf’ conc’ en passant par la revue.

Bernard Coulais a composé une partition originale aux accents de valse musette et java, véritable hommage à l’époque, avec des accents de Satie dans les moments plus sombres.

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Dans la scène dédiée aux garçons de café, l’ambiance est d’abord joviale avant de devenir menaçante, plateaux devenant barrière pour enfermer le peintre car malheureusement, Toulouse-Lautrec, souffrant dans son corps, ne put se contenter de son immense talent.

Il se noya dans l’alcool et sa passion des maisons closes, ajoutant la syphilis à ses maux.

Peu à peu, les danses deviennent bizarres, les hommes portent jupons et les femmes une moustache : l’absinthe produit des hallucinations...

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Minimal, laissant place à la danse, le décor est surtout de lumière dont les tonalités changent à mesure des ambiances pour finir sur de tristes mauve et vert.

Une cage descend devant l’ombre de laquelle Toulouse-Lautrec danse une dernière fois puis la fête s’éteint, laissant le peintre mourant dans les bras de sa mère, presqu’en Piétà. 

Il n'avait que 36 ans.

(c) David Herrero

(c) David Herrero

Remarquables par la qualité de leur danse, les interprètes nous ont aussi régalés de leur expressivité et ce sont des applaudissements nourris qui ont salué cette éblouissante représentation.

Du 10 au 16 mai 2023 à la Maison de la Danse
Toulouse-Lautrec • Ballet de l'Opéra National du Capitole • 2021 • 35 interprètes

Chorégraphie, mise en scène, livret Kader Belarbi - Dramaturgie Carole Teulet Scénographie Sylvie Olivé - Conseillère artistique Danièle Devynck - Musique Bruno Coulais – Costumes Olivier Bériot – Lumières Nicolas Olivier, Vincent Cussey – Accordéon Sergio Tomassi – Piano Yannaël Quenel – Crédit photographique David Herrero

Avec :
Toulouse-Lautrec Ramiro Gómez Samón (1) / Philippe Solano (2)
La comtesse Adèle Alexandra Surodeeva - Jane Avril Natalia de Froberville
Suzanne Valadon Marlen Fuerte Castro (1) / Jessica Fyfe (2)
La Goulue Solène Monnereau - Cha-U-Kao Kayo Nakazato
Grille d’égout Tiphaine Prévost - Rayon d’or Nina Queiroz
Lily la Rousse Sofia Caminiti - Carmen Gaudin Nancy Osbaldeston
Nini Pattes-en-l’air Marie Varlet - La Môme Cri-Cri Juliette Itou
La Tonkinoise Saki Isonaga - Marcelle Lender Georgina Giovannoni
Finette Lian Sánchez Castro - May Belfort Yuri Mitsuashi   
La Sauterelle Nino Gulordava - May Milton Haruka Tonooka
La Môme Fromage Luna Jušić - La Gazelle Elisa Blot
Le Comte Rouslan Savdenov - Valentin le désossé Alexandre De Oliveira Ferreira
Passe-partout Kléber Rebello - Pied-de-vigne Minoru Kaneko
Gabriel Tapié de Céleyran - Simon Catonnet
Jean Lorrain Jérémy Leydier - Henri Rachou Amaury Barreras Lapinet
Maurice Lorenzo Misuri - Warner Baptiste Claudon
Le prince Albert Grenier Eneko Amorós Zaragoza
Emile Bernard Charley Austin - Fernando Mathéo Bourreau
Coutelas Luca Dario Calcante - François Gauzi Aleksa Žikić
Louis Anquetin Giuseppe Russo
(1) : 10, 12, 15 mai -  (2) : 11, 13, 16 mai

 

Coproduction Opéra National du Capitole / Scène Nationale d’Albi

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