Au début du 16e siècle, les bâtisses mitoyennes, qui composent alors l’ancienne maison communale, sont réunies derrière une façade unique.
Tout comme Douai, Arras, Noyon et Compiègne, Saint-Quentin construit en son Hôtel de Ville dont les travaux se terminent en 1509.
La tradition en attribue la conception dans le style gothique flamboyant à l'architecte Colard Noël qui, à la demande du roi Louis XI, était venu de Valenciennes avec son équipe de compagnons pour restaurer le transept sud de la Collégiale, future basilique de Saint-Quentin.
La façade ornée de 173 sculptures se termine par trois pignons d'influence flamande.
L’édifice a traversé les siècles sans guère de modifications, à part l'ajout d'un clocher, en 1647, avec une horloge, un timbre et un carillon de 9 appeaux (nom donné aux petites cloches des carillons).
Malheureusement, la Première Guerre mondiale fait des dégâts.
De nouvelles cloches sont fondues et ,aujourd’hui, le carillon se compose de 37 cloches couvrant 3 octaves chromatiques (du Do4 au Do7) et sonnant automatiquement une jolie ritournelle tous les quarts d'heure.
Le carillon de Saint-Quentin est aussi un instrument de concert, le seul en activité en Picardie sur lequel s'exerce le carillonneur actuel, Francis Crépin.
C'est physique car le clavier dit « à bâtons » est frappé avec les poings. Il est directement relié, comme le pédalier, aux battants intérieurs des cloches, grâce à une mécanique complexe de transmission.
Francis Crépin, carillonneur à Saint-Quentin - Région Hauts-de-France
Depuis 1643, les cloches de l'Hôtel de Ville rythment la vie des Saint-Quentinois. À son sommet, Francis Crépin. Dans le paysage campanaire des Hauts-de-France, le carillon de Saint-Quentin tien...
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Dans l’Hôtel de Ville se trouvait la Chambre de la Marque, un office où était mesurée et vérifiée, avant le blanchiment, la qualité des toiles de lin brutes, richesse commerciale de la cité qui en produisant de grandes quantité.
Sous les arcades, on trouve encore une grille dite "d'aunage" portant des encoches. Elle servait de référence à la taille d'une aune de bois, un bâton utilisé par les négociants pour mesurer les étoffes, toiles, rubans, etc. qui a donné son nom à la mesure elle-même
L'aune, qui était une taille variable selon les régions, fut remplacée en 1799 par le mètre-étalon.
Si les obus de la Première Guerre mondiale n’ont que peu touché l’Hôtel de Ville, il nécessite tout de même quelques restaurations.
L’architecte de cette reconstruction, Louis Guindez, ajoute deux ailes latérales de style néo-classique en 1926 et aménage l'intérieur en style Art déco.
Grâce à la visite guidée de l'Office de Tourisme de Saint-Quentin, on a la chance de pouvoir découvrir l'étonnant mélange de styles.
Au rez-de-chaussée, l'entrée est spectaculaire.
La bascule vers l'Art déco est saisissante, un saut dans le temps d'autant plus fascinant que tous les éléments sont d'époque.
Citée en 1856 par Viollet-le-Duc pour sa charpente, la Chambre du conseil accueille du 16e siècle à la Révolution française l’assemblée formée du mayeur, des jurés et échevins, puis, jusqu’en 1914, le Conseil municipal.
À l’issue de la Première Guerre mondiale, le nombre des conseillers municipaux étant porté à une quarantaine, la municipalité profite des travaux de réaménagement pour transférer le conseil dans une salle voisine et faire de cette pièce la Salle des Mariages.
La grande cheminée de l’ancienne Chambre du conseil se compose d’un manteau gothique surmonté d’une hotte et d’un couronnement Renaissance. Mutilée en 1793, elle est restaurée et modifiée en 1855-1857.
Trente ans plus tard, l’architecte municipal Delmas-Azéma retire les ajouts et découvre les traces de décors antérieurs : un semis de fleurs de lys, des drapés de statuettes, des flammes attribuées à la salamandre de François Ier.
En 1903, l’architecte des Monuments Historiques Eugène Danjoy et le sculpteur Anthime Chapot exécutent un nouveau décor pour la hotte et douze statuettes des pairs de France, dont trois têtes, volées pendant la Première Guerre mondiale, sont reconstituées en 1983.
Pour l'anecdote, aussi magnifique soit-elle, la plaque d'âtre n'est pas en fonte mais... en plâtre. Elle avait depuis longtemps disparu mais grâce à un moule retrouvé, une copie a pris sa place.
De 1508 à la Révolution française, les officiers royaux tiennent leurs audiences dans une salle appelée l’Auditoire, symbole même du pouvoir municipal.
En 1792, on y installe la Salle des Mariages puis, au milieu du 19e siècle, le cabinet du maire.
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, les nécessaires travaux de restauration sont l’occasion de mener à bien des réaménagements.
Le futur architecte municipal Louis Guindez propose en 1921 une refonte dans le style néo-gothique mais l’administration des Beaux-arts en charge des Monuments Historiques refuse, préférant un décor moderne sous les charpentes gothiques de l’ancien Auditoire.
En octobre 1924, Louis Guindez soumet donc un nouveau projet qui associe tous les éléments propres à l'Art déco : luminaires en verre et fer forgé, mobilier aux lignes droites en bois marqueté et plaqué, panneaux de bois sculptés...
Aujourd'hui encore, tout est d'origine, y compris les sièges en cuir de Hongrie. Se sont seulement ajoutés les boîtiers de vote et des connexions informatiques.
Ce bâtiment est vraiment très intéressant et je ne peux que vous conseiller d'aller voir par vous-même tous les détails que la photographie ne peut rendre.