Arménie 2017 - Les emplettes à Vardenis

Aujourd'hui commune rurale où font une étape les transporteurs routiers, Vardenis était à l'époque soviétique une ville prospère qui fabriquait, entre autres, de l'horlogerie et des composants électroniques.

C'est pour cela que si le quartier de Rita est un hameau sillonné de chemins boueux, le centre du village est doté de nombreux magasins : primeurs, épiceries, nouveautés, salons de coiffure et beauté, mobiles etc.

Comme Anna, la petite-fille de Rita vient de se marier, nous sommes invitées pour le café (autant dire :  "festin de friandises").

Outre les emplettes alimentaires, j'ai demandé à Rita ce qui ferait un bon cadeau de mariage et elle m'a suggéré de compléter le trousseau. J'ai donc opté pour une coquette robe de chambre en polaire, à la mesure du climat de montagne...
 

Si les jeunes sont à la dernière mode européenne, les moeurs en revanche restent strictes :  les amoureux se voient, se téléphonent et s'écrivent via Facebook mais il n'y a pas d'intimité avant la noce. Une fois mariés, il n'y a pas de divorce car la femme ne pourrait plus se recaser. 

Quand j'ai demandé, pour plaisanter, si comme autrefois le fiancé devait "enlever" sa bien-aimée, la mère d'Anna, Anouchig, m'a dit que ça existe encore mais en manière de jeu, à condition que la fille soit consentante.

Puis à ma grande stupeur, elle m'a révélée que pendant la guerre du Haut-Karabagh,  il y avait eu des enlèvements à la pointe du fusil : la fille une fois déshonorée était alors obligée de se marier, sous peine aussi qu'on s'en prenne à sa famille.  La guerre révèle les pires instincts des sales types.

Anna, qui étudie la sociologie, a épousé un homme qu'elle aime, qui travaille comme transporteur routier. Toutefois, une fois la période de félicitations, visites et cadeaux terminée chez ses parents, le couple n'habitera pas seul mais chez les parents du mari, jusqu'à leur décès... Autant dire que la notion de belle-mère est très lourde pour les jeunes mariées, car elles lui doivent totale obéissance.

Rita souhaite passer par l'église pour se recueillir. Devant l'édifice, une fontaine-mémorial a été édifiée pour un jeune homme tué dans un escarmouche avec les Azéris. Bien qu'il y ait eu officiellement un cessez-le-feu et que le Haut-Karabagh soit plus ou moins une république indépendante, les Azerbaidjanais continuent les attaques et les actes terroristes.

De fait, chaque Arménien doit effectuer deux ans de service militaire et peut se retrouver au front, en renfort de l'armée professionnelle.

Il paraît que le curé est strict quant à l'obligation des femmes de se couvrir la tête pendant la messe, aussi des carrés de dentelle sont à disposition. Mon écharpe en soie fait l'affaire.

Nous arrivons au moment où le rideau s'ouvre. J'avoue n'avoir jamais su à quoi ça correspond, mais une partie de la messe est célébrée à couvert, avec un chantre, puis, comme au théâtre, le rideau s'ouvre sur le curé qui prononce des prières puis marche dans les allées avec un encensoir suivi des enfants de choeur.

Rita brûle deux cierges et m'en offre deux que j'allume par courtoisie. Ce moment me renvoie à mon enfance, quand ma grand-mère me trimballait à l'église tous les dimanches.

Ce n'était pas une corvée car les chants grégoriens étaient superbes et l'encens embaumait. En revanche, même si je me signais et prononçait consciencieusement les textes rituels, la foi ne m'a jamais touchée, ni même effleurée.

Nous terminons la promenade à la boulangerie pour emporter quelques délicieuses patisseries.