Si la danse flamenca se transmet de génération en génération avec une force exceptionnelle, elle est loin d'être figée à jamais. Le spectacle en est une preuve brillante, que la Maison de la Danse de Lyon nous permet de découvrir en décembre en invitant le
Rafaela Carrasco en fut d’abord élève, puis soliste et chorégraphe. Elle est à présent la directrice artistique et son Imágenes a été récompensé en 2014 par le prix Giraldillo désignant "le meilleur spectacle visant à maintenir vivante la mémoire de ses maîtres au travers d'un excellent travail chorégraphique".
Pour célébrer le vingtième anniversaire du Ballet, Carrasco rend hommage, dans l'ordre de succession, aux grands noms qui l’ont précédée : Mario Maya, María Pagés, José Antonio Ruiz, Cristina Hoyos et Rubén Olmo.
S'inspirant d'une pièce de chacun, elle les réinterprète en cinq tableaux, avec une nouvelle approche chorégraphique et aussi , comme l'ajout d'illustrations sonores.
La suite est plus douce tandis qu'Ana Morales et David Coria, dansent sous la lune, En la oscuridad de la luz. Ils rendent à Maria Pagés un hommage passionné, apportant leurs touches d’innovation sur les rythmes codifiés. La technique du danseur qui virevolte met en valeur la grâce passionnée de Ana Morales, pour un duo d’une grande complicité. Avec tout le corps de ballet qui les rejoint, on est fasciné par les mouvements de bras particulièrement originaux.
Très vite, arrive Rafaela Carrasco vêtue d’une robe blanche à la traîne interminable. Dans Leyenda, elle incarne la Carmen Amaya célébrée par José Antonio Ruiz. Dansant à pas retenus, elle semble surgir d'un flot d'écume quand dans un style à la fois moderne et classique, elle enchaîne les postures flamencas comme autant de tableaux vivants.
Quand les autres danseuses la rejoignent en jouant de leurs traînes avec un art consommé, ce mouvement de blanc est un spectacle saisissant sur lequel se projette des motifs de lumière rouge.
Le décor change pour introduire des valises, en référence au Viaje al sur de Cristina Hoyos, revisité en Mirando al sur, pour lequel Hugo López est le pendant masculin. Il bondit, tournoie, frappe des pieds et enchaîne les pirouettes avec l’habileté d'un danseur classique dévoré par le flamenco. Le corps de ballet n'est pas en reste, dansant sur les valises devenus caisses de résonance
Pour finir, Las Cuatro Esquinas revisite El llanto por Ignacio Sanchez Mejías de Rubén Olmo. Les danseuses tournoient dans de somptueux châles à franges à la rencontre des danseurs qui s'en emparent pour en faire des muletas de toreros, puis pour s'y enrouler avec une belle. Le spectacle se termine dans une apothéose de couleurs et le public conquis applaudit à tout rompre.
Dans tous les tableaux, on trouve des détails qui ne sont pas dans la tradition initiale, comme la percussion des paumes sur le corps ou des moulinets de bras issus de la danse contemporaines, mais ils sont si bien intégrés qu'ils ne trahissent en rien l'âme du flamenco, d'autant que l'émotion de la danse est sublimée par les excellents cantaores et guitaristes, attentifs à chaque modulation des danseurs pour une totale harmonie.
On ressort de Imagénes avec la certitude que si la tradition a bien été préservée par l'institution qu'est le Ballet Flamenco de Andalucía, l'avenir s'annonce tout aussi brillant dans son évolution.
Direction artistique Rafaela Carrasco
Chorégraphie et solistes Rafaela Carrasco, David Coria, Ana Morales, Hugo López / Corps de ballet Alejandra Gudí, Florencia O’Ryan, Laura Santamaría, Paula Comitre, Carmen Yanes, Eduardo Leal, Antonio López, Alberto Sellés
Guitares Jesús Torres, Juan Antonio Suárez “Cano” / Chant Antonio Campos, Antonio Antonio Núñez “El pulga “Son Rafael Gómez
Lumière et espace scénique Gloria Montesinos/ Costumes Blanco y Belmonte